lundi 17 avril 2023

Pourquoi je lis

"A book is nothing but a cube of hot, smoking conscience."

- Boris Pasternak

Parfois, je me déconstipe le cerveau, je le décongèle, je lui donne des ailes. C'est-à-dire que je vais m'installer dans un café pour écrire. Mais ce n'est pas d'écriture dont je veux parler aujourd'hui.

Quand on aime écrire, on a une passion cousine, que dis-je, une passion siamoise : l'amour de la lecture. 

En toute innocence, et n'y a-t-il que vieux comme moi qu'on puisse faire preuve d'une telle innocence, je me suis demandé pourquoi je lis. Pourquoi j'aime lire. Et pourquoi, par contraste, je n'aime pas certains livres ; quels nutriments intellectuels et émotionnels seraient alors manquants ?

Lire, ce n'est jamais la même expérience, déjà.

J'aime lire parce que ça fait un esprit avec lequel échanger. Je dis bien échanger. Une fois, dans un centre de contacts avec la clientèle, j'étais sur ma chaise, là, voilà, en train de lire, et un collègue m'a demandé ce que je faisais. Je lui ai dit que j'étais en discussion avec un auteur. Rien d'pédant, là, pour moi, c'était une vraie discussion. Il s'est esclaffé, il croyait que je disjonctais, ou que j'utilisais un vocabulaire inapproprié. Si, si. En discussion. « Frotter et limer sa cervelle contre celle d'aultruy », comme l'aurait dit Montaigne.

J'aimeuh lireuh, parce que ça fait découvrir d'autres univers. Littéralement, j'veux dire. Y a des mondes alternatifs, et certains des plus beaux sont cachés dans les pages des livres. On a dit de Boris Vian qu'il avait un « langage-univers ». Pas que. Le type était le plus grand créateur d'univers alternatifs qui fût.

J'aime lyre à cause de la beauté des phrases. La beauté des phrases qui est parfois comme de la musique. Spontanément, tout de suite, je pense à Baudelaire. Ou plutôt, c'est lui qui m'a inspiré cette remarque. Lire Baudelaire, dans sa grande prose, m'excite probablement plus le cerveau que la musique classique ne sait, dans toutes ses caresses, le faire.

J'aime apprendre quand je lis. Et si l'on veut apprendre, on est servi. Il me brûle de lire Une brève histoire du temps de Stephen Hawking. Comment ça se fait que je ne l'ai pas encore lue, cette histoire, déjà ? Parce qu'il y a beaucoup de livres desquels apprendre !

J'aime réfléchir quand je lis. En cela, beaucoup de livres (ou d'articles, pardi) se qualifient. Une des choses qui explique le fait que je sois un lecteur lent, c'est la surstimulation de mon cerveau, quand je lis. Souvent, l'esprit empli d'une floraison de songes, le cœur gonflé de rêves, je dépose le livre sur moi, un moment, comme pour en mieux absorber le contenu. Et je pense !

Lire, rêver, deux mots apparentés jusqu'à un certain point. Lire permet de rêver de façon structurée, de façon puissante, de façon lointaine. Le Matin des magiciens m'a fait énormément rêver. Les poèmes de Rimbaud aussi. Quid des livres sur les extra-terrestres ?

Lire permet de rencontrer des êtres humains. Parfois, un être se présente à nous en empruntant l'autofiction ou l'autobiographie. N'est-il pas fascinant de prendre un bouquin de Laferrière pour le rejoindre, pour passer du temps avec lui ?

En lisant, on peut rencontrer une autre culture. On l'habite, et elle nous habite.

Lireeee permet d'être diverti.

Lire permet de ressentir. Quand on se croit magané, quand on se croit éteint, il suffit parfois de s'engager dans la lecture d'un roman, ou d'un simple poème, pour voir que ça palpite encore là-dessous, dans notre poitrine.

La lecture permet en outre de bonifier son vocabulaire et d'améliorer ses aptitudes langagières.

Lire permet de prendre part à un mouvement, ou à quelque chose de plus grand que soi. Par exemple, si l'on est un individu neurodivergent, en lisant un livre sur la neurodiversité, on peut se sentir inspiré.

Ultimement, lire, c'est accepter un partage : beaucoup de magnifiques choses se perdraient dans l'univers si elles n'étaient pas écrites...

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