Exercice de prose sur le pouce. J'ai décidé de prêter plus d'attention à ma prose intérieure, aux mots spontanés, parlés, curieux, gratifiés d'un je-ne-sais-quoi coquet, qui peuvent, les jours fastes, se manifester dans ma tête. Je crois qu'on est tous des prosateurs si l'on se reconnecte à notre langue intérieure.
C'est arrivé tantôt. Je venais de mettre les pieds à la station de métro Longueuil-Université-de-Sherbrooke. Ce qu'il faut savoir c'est que j'ai grandi à Laval et que Laval c'est un univers assez gentil en somme, avec de bons citoyens, presque dressés comme des automates mais pas tout à fait, des personnes gentilles qui sont capables de faire la file pour l'autobus et plus encore, comme d'être polis et respectueux et tout ça. Longueuil me fait penser à Laval.
Moi, à Montréal, maintenant, j'habite parmi les fleurs sauvages, les nerveux, les gens un peu disjonctés. Bon, il ne faut pas généraliser. Il y a des cocos à Laval et de grands sages philosophiques à Montréal.
Tout ça me mène au morceau, au tout petit minuscule fragment de prose spontanée qui m'est venu en tête, tandis que je cherchais, dans les couloirs de la station qui se métamorphosent en carrefour entrelaçant foire alimentaire et couloirs universitaires, la Place Charles-Le Moyne. En observant tous ces gens gentils qui me regardaient comme si j'étais un des leurs (on n'efface pas les traces du banlieusard dans l'ex-banlieusard), j’ai songé, et mon détecteur de prose m’a alerté : C'est un écosystème différent de celui où j'habite. C'est comme celui où j'ai grandi. C'est un écosystème gentil et balisé. C'est rempli de gens gentils et balisés. Ici, les gens me considèrent spontanément comme un des leurs.
Puis ce fut mon rendez-vous médical, et la station Longueuil-Université-de-Sherbrooke de nouveau.
Repu de ce tissu humain tendre et simple, ayant fait le plein de bonnes énergies auprès de cette autre civilisation, reposée et reposante, j'ai filé sur la ligne jaune derechef, histoire de réintégrer l'excentricité mélancolique et le bouillon d'énergies de Montréal.
Je suis un ex-banlieusard et je me sens souvent comme un exilé lorsque je retourne dans cette banlieue. Je ne peux plus m'empêcher d'y voir le royaume des automobilistes et des espaces privés.
RépondreSupprimerIntéressant ! En fait, tu as raison, on peut enfiler différentes casquettes, différentes lunettes. L'effet que je décris, fouille-moi pourquoi, je le ressens à cette station de métro, et peut-être aussi aux stations de la ligne orange, à Laval. Mais il est vrai que lorsque je me promène en banlieue, en allant visiter ma famille, je me sens souvent comme un étranger. Je me sens étranger à plusieurs de leurs us et coutumes.
RépondreSupprimerOh, je comprends peut-être ce que tu veux dire. Il y a un effet un peu plus "tiers-lieu" dans les stations banlieusardes: on s'y attarde moins en général qu'aux stations en ville. Peut-être parce que moins de gens habitent immédiatement à côté? On sent que c'est temporaire, comme dans un aéroport.
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