mercredi 20 mars 2013

Coeur lavé


Je t'ai rencontrée dans le ventre de l'hiver,
La neige, évaporée en louvoiements fumants,
Blanche comme asile calme et voluptuaire,
T'habillait, décuplait ton air d'ange ardemment...

J'avais cicatrice creuse tout juste ici...
Dans ma poitrine un moignon ombrageux battait...
Mes sourires sciaient l'ombre, car avait fui
Mon amour, celle qu'influx aux lèvres j'aimais !

Attends ! Laisse-moi t'expliquer, ô chère amie...
Ridiculement sobre ce feu n'a été !...
Nous allions ! tels que des archanges embellis
Par leurs passés durs, en vengeurs des temps salés...

Tu vois ! Elle et moi, forts de nos ans d'infortune,
Nous régalions de l'air grinçant qui s'échappait
De nos fontanelles de givre sans rancune...
Nous aimions, malgré le passé au souffle épais !

Ainsi, je ne suis pas un naïf des histoires
Sans apogées, un coco au coeur sans syntaxe !
Je sais l'éclat sardanapalesque des soirs
Où triomphent baisers, yeux flous, rires sans axes !

Je sais la pureté d'un coeur qui est l'esclave
De sa tremblante liberté, je sais le voir !
Et c'est un attentat de dire qu'est pourrave
La gemme qu'est l'amour, calciné ce miroir !

Le choc gracieux du hasard qui leva le voile,
Pour toi et moi, fait sous le parafe serein
De Dieu, qui n'eut qu'à tisser d'étoile à étoile,
Avait tout du ciel blond, de l'oiseau azurin !

Les synchronicités, la belle et grande affaire !
Un peu plus ! et la noce d'anges affairés
À nous encenser sortiraient de leurs théières,
Grognant comme des tribaux un peu demeurés !

J'y ai cru, d'abord, tu sais, à ces fameux signes !
Pour toi, cela n'est que chimère tartinée !
Tu t'arroges l'haleine divine, et indigne,
Parfumes de bobards la foi ratatinée !

Mais j'y ai cru. Qu'importe ! À présent, grâce à toi,
J'ai replongé dans le monde spirituel,
J'ai su voir, par-delà les horizons crétois,
Les mille milliards d'embrasements qui m'appellent !

Tu es donc un ange ! Une vraie de vraie sorcière !
Tu es une sainte, une folle, une sainte, une...
Pouah ! Je ne sais que dire, ôte donc ta visière !
Quel visage se cache derrière la lune ?

Si je devais juger tes seuls tressaillements
De l'esprit, je serais avec toi combien âpre !
Mais comme tu empestes le divin encens,
Belle écervelée, je suis doux comme ovicapre !

Mais tu exagères ! Arrête de jouer !
On ne traîne pas dans la boue le romantisme,
On ne peut se jouer des synchronicités !
Ce que je veux aimer jouxte ton égoïsme...

Sais-tu combien tu es mélodieuse, indigène !...
Tu galvaudes l'appel entier de cette vie,
En préférant les souterrains sans oxygène...
Où vas-tu, espèce de courant d'air ravi ?

Je pourrais te louer, afin que tu comprennes !
Mais ce serait être traître envers ma personne !
Sibylle, déesse, succube, noire reine !
Pythie, égérie ! angelot, folle et démone !

Toi, l'excessive feutrée, tu ne peux lancer :
« Oh ! J'entre dans tes rêves la nuit, les féconde !
Je vois tout, à commencer par ton esprit bé ! »
Surtout quand un coeur noir a suffoqué l'immonde !

Aussi artistique que l'air qui peut peler
En mille excroissances, en un ballet verveux,
Tu sauras trouver des réfutations zélées,
Tu seras fontaine d'arguments astucieux !

Charité bien ordonnée commence par soi !
Penses-tu que le mage décati est stable ?
Prétentieusement, je me sais plus fou que toi !
Mes trois cents travers sinoques sont houspillables !...

Tu brûles d'un feu qui vient sans doute d'ailleurs !
Or, je t'observerai flamboyer loin de moi,
Soleil impétueux ! Merci pour ta ferveur,
J'irai me consumer sous de nouveaux émois !

4 commentaires:

  1. Déjà pour le lire, ton poème, il faut avoir du souffle et que dire pour l'écrire! Chapeau, comme toujours. Est-ce le commencement d'un cycle poétique sardanapalesque? Une sorte de "guillaumisation" d'un romantisme postmoderne aux mouvements browniens comme tu les aimes et réussis.

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  2. @Mokhtar On me parle souvent de ce souffle. C'est vrai que je suis ailleurs quand je compose, j'imagine que je plonge quelque part, d'où l'idée d'avoir beaucoup d'oxygène. Tes commentaires me font plaisir, l'ami.

    @La Rouge Merci mademoiselle.

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  3. Ho !

    "espèce de courant d'air ravi " ... je reviens lire ça, et même plus...

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