dimanche 13 janvier 2013

Poème d'un ami : La Tarasque


Le poème d'une personne que je connais.

A. M.

La Tarasque
Au fond d'un gouffre sommeille une arche ruineuse,
Ses entrailles, tombeau de marins téméraires,
S'ouvrent géantes, car la Tarasque ils bravèrent!
Tous gisent désormais dans une eau ténébreuse.
Ils virent serpenter sous l'eau une ombre étrange,
Elle ondulait les vagues et s'y confondait;
Sous la lame, les rares poissons s'effrayaient,
Car la Tarasque n'est qu'un animal de fange!
La queue claquait la surface et une eau saumâtre
Giclait, la lune lui sculptait une pléiade
De minuscules diamants, tous d'un blanc fade.
Pré d'étoiles! la Tarasque en était le pâtre.
Le pont grouillait d'une foule de matelots,
Tous la louaient! Elle longeait la caravelle,
Ses écailles scintillaient d'un doux pastel;
De l'écume naquit, elle émergea de l'eau.
Deux cornes l'ornaient, la tarasque était hideuse!
Gueule béante, elle sifflait en cris stridents;
De ses narines jaillissaient des jets fumants,
Son sinistre regard présageait la Faucheuse.
Les mains s'armèrent de leurs longs cimeterres,
Mais déjà, sur ses crocs palpitait la vigie;
Elle recracha la carcasse avec mépris
Et s'enfouit sous le lit spumescent de la mer.
Le bateau dérivait, car le mât, arraché,
Laissa le bateau errer sur une eau houleuse;
Les marins contemplèrent l'ire ravageuse
De la tarasque, de ce monstre meurtrier!
Les gabiers maudissaient leur funeste destin.
Au loin, ils entendirent mugir une bête,
La Tarasque! Ils en contemplaient l'unique crête,
Qu'elle fut l'instrument d'un injuste dessein!
Cette hydre était enfiévrée de froides démences,
Elle s'avança vers le bateau en déroute,
D'un coup de sa gueule, elle éventra une voûte,
Ses yeux ne laissaient paraître aucune clémence.
Les plaintes se jonchaient aux bruits d'os concassés;
Le capitaine du navire, le féal,
Luttait vainement à la lueur d'un fanal
Contre la Tarasque et son armure bleutée.
Le fer fléchit contre l'enveloppe écailleuse;
Le visage du capitaine devint grave,
Car il voyait son bateau devenir épave
Et ses gens s'échouer aux berges rocailleuses.
Hélas! La Tarasque venait de l'étêter,
Le corps sanglant frémissait convulsivement;
Il fut le dernier qui s'écroula, lourdement,
Ravi par la Tarasque et sa vile âpreté.

2 commentaires:

  1. Splendide écrit que celui-ci!
    Une telle force, une telle musicalité!
    C'est tout un talent. Il faut écrire encore et encore, avec une telle plume.
    Le monde a besoin de ces mots, de ce créateur pour renverser un peu la vapeur, pour apporter des éclats de possibles à cette ère maudite.
    Ça y est. Je suis jalouse de ta plume.
    Si tu n'écris, tu me vendrais ton talent?
    Ou ton âme, c'est selon.

    La Diablesse :-)

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  2. On ne peut plus exact. Un grand et flamboyant talent !

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