Portrait II

Des cendriers, s'élevant en fumerolles, criblent tout le décor à la façon de cratères de déflagrations. C'est un jeune homme maigre — de petits muscles élancés occupent bizarrement ce corps filiforme —, à la fade peau brunâtre qui a cessé de se vouer à la lumière. Il a des jades vissés dans les orbites. C'est un gitan aux délires dissous, une idéalisation de précipice au coeur ; il se répand en mouvements tombants, trébuchants. Il a un bracelet de cuir au poignet et l'aura menottée. Une chemise échancrée, aux fleurs foncées, aux couleurs râpées. Ses rêves ont le goût trouble des orages déchus, blancs, en bouscueil, l'odeur du feu mouillé. Une guitare électrique à l'enivrement dégazéifié, rappelant les années soixante, beige, brune, surtout brune, un fin contour jaune, un glacis encore chaud, une telle guitare prend appui sur une table. Les yeux du jeune ménestrel, difficilement vaillants, se liquéfient de l'intérieur. Ses traits font des allusions à une solitude passionnellement recherchée. Sa pomme d'Adam est dénouée anxieusement, comme un noyau de pêche beige au lacis étrange.